Lentz
Ta S






17 août 1965



Mon amour chéri,


Il y a trois jours seulement que nous nous sommes quittés ; il me semble qu'il y a un siècle ... Après ton départ j'étais tellement désespérée que je me suis demandé si j'allais avoir le courage de partir. Et puis la pensée de ces interminables journées, dans cette maison si triste sans ta présence, m'a poussée à prendre la route quand même.

Je suis donc en Auvergne, où je suis arrivée dimanche dans l'après-midi, assez fatiguée. Le physique se remettra, mais le moral est bien bas ... Je savait que cette séparation serait pénible, mais je ne me doutais pas que ce serait à ce point là.

Ton image ne quitte pas un seul instant mon esprit et ma pensée. Je m'éveille en pensant à Toi, la journée je promène partout une figure absente et le soir je t'emmène avec moi dans mon sommeil et dans mes rêves.

Que ne donnerais-je pas pour que ces vacances soient terminées. Lorsque je recevrai de tes nouvelles, cela commencera sans doute d'aller mieux. Mais pour le moment ce vide brutal après six mois d'intimité me tue.

Pardonne-moi chéri de me lamenter ainsi, mais il fallait que je le fasse pour essayer de me soulager un peu.

Tu sais que mes sentiments ne sont pas feints et que je me suis donnée toute entière à cet amour qui a boulversé ma vie.

Comme tu le disais l'autre jour, nous nous aimons et l'"ordre logique" des choses voudrait que nous soyons continuellement ensemble. Hélas, la vie n'est pas toujours comme on voudrait qu'elle soit.

Au moins, j'espère que ces vacances te seront bénéfiques sur le plan physique et que tu te reposera. Ainsi cette séparation, qui m'est si dure, aura quand même servi à quelque chose.

Cette lettre te parviendra-t-elle seulement ? Je le souhaite et je continuerai d'écrire ainsi jusqu'à ce que je sache que ma correspondance te sera parvenue.

Roger chéri, mon âme est si trise que je ne voudrais pas que cette tristesse déteigne sur toi.

Aussi vais-je terminer pour aujourd'hui non sans te dire une fois de plus combien tu es en moi, habitant mon corps et mon âme ... Je voudrais pouvoir mettre mes bras autour de ton cou et chercher ton regard dans tes beaux yeux caressants ... Je t'aime, je t'aime, mais je suis sans malheureuse sans toi .

M.A.